décembre 2015
Déplacer son point d’optique terrifie parfois le regard et non le sujet observé. Révèle l’ensemble et non un objet en particulier. Dans la ville nouvelle les vestiges de l’ancien monde croulent sous les ruines. Ils ont été normalisés, transformés ou tout simplement éradiqués. Faut dire que l’hôpital a un style imposant, plus épuré, froid et massif. Il a besoin de place, toujours plus. Il est en extension permanente et se remplit à la vitesse du cimetière. Il est même bioéconomique, c’est sa nouvelle tendance du moment. C’est un modèle parfait, comme le blockhaus, certes en moins solide mais en plus sordide. Un gabarit approprié pour l’habitat des administrés abrutis. En ville ou à l’hôpital tu remarqueras que les matériaux sont les mêmes et utilisés de la même façon. Les immeubles-cliniques te regardent et te voient, t’entendent et t’enterrent. Le tout en high-tech. Made in Asile. Je dois me ressaisir, à la clinique-ville la publicité ne cesse de crier et personne ne s’en plaint, moi-même je ne dis plus rien. Dans les yeux l’agréable n’a jamais existé. Tout est tellement répugnant et à but sédatif. La culture, l’art, tout ça du prêt-à-bouffer pour les affamés, plaire-réjouir-distraire, plaire-réjouir-distraire. En ville ou en milieu rural c’est le même carnaval. Assez!!
C’est curieux tout ce génie, toute cette créativité, toute cette énergie, toute cette compétence, toute cette technique, tout ce savoir-faire, toute cette abondance, toute cette suffisance, toute cette arrogance, toute cette pestilence qui fait horreur, et tout ça au service de mon bien être ?!
Si la dépression a de l’avenir il n’y a pas d’avenir possible pour les dépressifs.
retrouvez ce texte dans sa version en audiorama ici : hôpitalville
Revue Le Boock #3
