comme tout le monde & les hommes choses

décembre 2016

pour être comme tout le monde, il faut être un peu tout le monde soi-même. cette idée est effrayante et pourtant chacun apprend à faire de lui-même ce que tout lui oblige. La majorité est une pathologie. prostré en attendant la providence tu regardes la connerie sur orbite. elle n’a pas fini de tourner. depuis des siècles elle travaille à sa généralisation. elle est aujourd’hui planétaire. son côté mesquin pousse le rire mais rapidement le pathétique l’emporte. tu la respires, elle te commande. tu l’ingères et tu deviens ce que tu manges. ferme les yeux, tu es ce que tu penses. inutile de rechercher sa signification tu comprends qu’à toute propagande utile il y a un vocabulaire qui la sert. la connerie est quatre cent fois plus que tout elle revêt tous les masques sans en être aucun.

la crise comme la bêtise s’est installée officiellement pour toujours. la politique quant à elle, tente de feindre le contraire, alors que les individus se désabusent peu à peu et n’y croient plus. aucunes perspectives d’améliorations ne semblent poindre dans le surréalisme social. le désastre avance et la fin est quasiment imminente. les diagnostiques des spécialistes sont unanimes sur la question terminale, la fin de ce monde est pour bientôt, elle devrait être complète et venger toutes celles qui n’ont pas eu lieu, il était temps, nous n’allons pas nous plaindre !

la fin festive du monde semble quand même plus crédible que la fin du monde festif.

nous verrons tout – nous ne sentirons rien. la désintégration complète de la volonté est inculquée depuis longtemps, désormais, elle s’applique partout. les plus récalcitrants seront jetés comme de simples déchets et les autres tituberont sur les boulevards de la résistance. accepter sa totale résignation n’est pas sans effets secondaires, heureusement le catalogue pharmacologique du nouveau bien-être nous y aidera. si vous n’êtes pas manipulable vous serez moléculable, un vrai slogan d’avenir pour un futur dans le dos, en réalité c’est la mort du sensible à la vue de tous.

pris dans un élan et un enthousiasme universel débordant nous avons plongés dans une obscurité délirante. il faut reconnaître froidement que tout a lamentablement échoué, néanmoins il existe une alternative peu joyeuse mais possible : quand nous seront tous des marchandises et ça ne saurait tarder, nous devrions enfin circuler librement selon les traités commerciaux, en effet, ils garantissent la libre circulation des biens. quelle chance !

il est vrai que nous aimons les jolies histoires, c’est peut être là notre tort.

retrouvez ce texte dans sa version en audiorama ici : Comme tout le monde

* * *

Les hommes-choses

chaussures sur l’autoroute je vous regarde et me demande comment en êtes-vous arrivées là ? perdues ou délaissées vous avez échoué ici sur les côtés ou les bords du terre-plein central. la veille de mon départ en voyage je suis très excité, et sur la route je m’agite à l’idée de vous y croiser. j’anticipe même la présence prochaine d’une de ces godasses, une forme au loin, un relief sombre et l’intrigue m’intrigue. ça y est, la première est en vue et je ne peux m’empêcher de vous relier à une histoire qui serait la votre et un peu la mienne. je suis surpris quand vous semblez neuve, trouve des circonstances et des raisons à votre abandon, certes insuffisantes mais eu égard à votre état je me demande si ce n’est pas mieux ainsi, « allé, adieux vieilles chaussures! » un sentiment confus m’envahit, je ressens une forme d’empathie mêlée a de la peine et une curiosité intense. je m’imagine des histoires toutes aussi folles que votre présences ici. plus mon imagination s’aiguise plus le pouvoir magique de l’énigme s’opère. L’obsession n’est pas loin. Je suis à l’affût presque aux aguets. chaussures abandonnées je ne vous avais jamais regardées tout juste entraperçu et sous cet angle tu me poses bien des questions. je suis sur l’autoroute et ta logique me déroute…

_ faut pas déconner, le retour au réel n’a pas tardé, l’absence n’a durée qu’une demi seconde et je vais aller pisser pour y réfléchir.

récemment j’ai trouvé une réponse qui me convient pour l’instant. l’important ce n’est pas le comment ou le pourquoi, vous êtes là, où personne ne se rend qu’en cas d’extrême urgence. je suis habitué à votre rôle et à votre usage c’était là mon erreur, le chausseur n’est pas la chaussure. inutile d’aller plus loin, j’ai compris que c’était un endroit de mort, il existe des individus que l’on peut assimiler à des choses, il y en a que l’on devrait regarder comme ces chaussures en passant par les bords et derrière une fenêtre. il n’y a plus d’énigme mais ça valait toute cette peine pour en être certain.

Revue Le Boock #4

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